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lundi 23 décembre 2013

Au Grand Casino de la Finance, par Paul Jorion

« Paul Jorion est titulaire de la chaire « Stewardship of Finance » à la ’’Vrije Universiteit Brussel’’ et fait partie du Groupe de réflexion sur l’économie positive dirigé par Jacques Attali. Il est diplômé en sociologie et en anthropologie sociale (Docteur en Sciences Sociales de l’Université Libre de Bruxelles). Il a enseigné aux universités de Bruxelles, Cambridge, Paris VIII et à l’Université de Californie à Irvine. Il a également été fonctionnaire des Nations-Unies (FAO), participant à des projets de développement en Afrique. » C’est ainsi qu’il se présente lui-même.

D’après mon analyse de cet article trouvé sur son Blog, Paul Jorion nous fait partager l’ambiance des salles de marché, peuplées de « traders » animés par la cupidité et l’adrénaline propres aux spéculateurs de la finance. Quand une banque vacille, ces tricheurs gagnent des centaines de millions d’euros en pariant sur sa perte. Les banques elles-mêmes trichent aussi, comme on l’a vu dans les scandales du Libor et de l’Euribor. Des ententes généralisées entre tous ces tricheurs entraînent les banques et toute la finance vers une chute « systémique » inéluctable.

Fin du XIXème siècle, au plus fort de la colonisation, des groupes de pression font supprimer les lois anti-spéculation. Les richesses pillées dans les Colonies, dont nos peuples ont bénéficié aussi, ne font pas apparaître les somptueux profits qu’en tirent les spéculateurs. Mais nous en sommes maintenant arrivés à l’épuisement des ressources de la planète. Il ne reste plus à la spéculation qu’à pomper littéralement dans l’épargne des classes moyennes, dans les salaires toujours plus réduits et jusque dans les dettes et les budgets des Nations.

Ce casino financier condamne l’économie réelle. Paul Jorion préconise de remettre en vigueur les lois anciennes : l’article 421 du Code pénal qui dit « Les paris qui auraient été faits sur la hausse ou la baisse des effets publics seront punis des peines portées par l’art. 419 » ; et l’article 1965 du Code civil qui dit « La loi n’accorde aucune action pour une dette de jeu ou pour le paiement d’un pari », autrement dit, le joueur qui s’estime lésé n’a pas l’opportunité de se tourner vers les tribunaux pour demander réparation. Ces deux articles très simples permettent selon lui d’interdire la spéculation.

De mon point de vue, les Etats devront prendre d’autres mesures concomitantes pour geler ces masses financières gigantesques qui sont en train de migrer dans les marchés du « shadow banking », et permettent aux spéculateurs de parier dans des plateformes appelées « dark pools » à hauteur de 100 trillions d’euros par jour ! Et sans qu’aucune autorité de régulation financière n’y ait rien à dire !

Lors des élections européennes qui s’annoncent en 2014, chaque Européen doit se demander si le député qu’il élit a la volonté de contrer ce casino financier de toutes ses forces et quoi qu’il en coûte. C’est une question de survie pour les entreprises et donc pour l’emploi, aussi bien que pour l’épargne des gens dans les banques. C’est aussi la façon de faire sauter ce barrage qui empêche les investissements massifs dans les énergies renouvelables et l’évolution de notre habitat vers une meilleure isolation des bâtiments (maisons passives). Car il s’agit de rendre durable la vie de sept milliards de terriens !

dimanche 8 décembre 2013

Le besoin d'éthique dans le consumérisme nous détourne de la transition vers les énergies renouvelables


Notre activité de consommateur a modelé notre identité personnelle : choix de produits de marques, recherche de la mode dernier cri, frustrations engendrées par la rapidité des évolutions technologiques. Dans la mesure où cette activité nous conforte psychologiquement au jour le jour, l’exigence de moraliser le consumérisme devient une exigence de changer ce que nous sommes.

Nos désirs de consommateur dépassent notre capacité d’utilisation des produits que nous achetons. Car il y a des limites à ce que nous pouvons manger, porter, regarder, et au nombre de pièces occupables simultanément dans notre logement. Entre ce que nous achetons et ce que nous utilisons durablement, il y a le gaspillage qui empire avec le développement du consumérisme. La culpabilité d’acheter des objets inutiles est d’autant plus forte que les revenus des gens sont faibles. Au fil du temps, les jeunes gaspillent plus et culpabilisent moins que leurs aînés.

Dès lors, il apparaît évident que c’est un devoir moral de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) liés à l’achat de biens qui sont gaspillés, utilisés très brièvement, et donc de faire correspondre nos désirs de consommateur à nos besoins durables d’utilisateur.

Changer notre façon de consommer revient à renoncer à notre identité telle qu’elle nous est imposée par l’industrie manufacturière ; donc à nous défaire positivement de notre culpabilité sur notre responsabilité individuelle quant au changement climatique. Nos choix individuels visant la réduction des émissions de GES n’impliquent pas de renoncer à notre confort, car un changement dans nos comportements individuels n’a collectivement qu’un effet minime sur le réchauffement climatique.

Les politiques et les puissants groupes internationaux cherchent à déplacer leur responsabilité sur les problèmes environnementaux et énergétiques vers la sphère des comportements individuels où le coupable c’est la « nature humaine ». Le débat public actuel exempte les institutions et les entreprises qui pérennisent et augmentent les dégradations à l’environnement et les émissions de GES, en laissant croire que les comportements individuels dans nos décisions d’achats vont y changer quelque chose. Ce faisant, ils font de l’éthique consumériste une marchandise !

Au lieu de rechercher les solutions énergétiques permettant de résoudre les facteurs systémiques qui sont la cause du réchauffement climatique, ils orientent la discussion sur le plan de la morale individuelle. On nous demande d’acheter des produits éco-compatibles, d’isoler nos maisons, de recycler nos déchets, etc. Sans critiquer l’utilité indéniable de ces activités, focaliser sur elles nos espoirs et les présenter comme la solution aux problèmes climatiques, détourne complètement les esprits des vraies solutions et bloque la transition énergétique vers les énergies renouvelables.

Les espoirs de changement ne doivent pas être placés prioritairement sur le consommateur, mais sur le citoyen. Car les vraies solutions constituant la transition vers les énergies renouvelables ne viendront pas de notre comportement dans un supermarché, mais de notre choix dans l’isoloir.

En fait, le changement climatique est un problème collectif global pour l’espèce humaine. Il requiert des actions politiques globales très fortes et d’en verrouiller la mise en place par l’ensemble des gouvernements de la planète.

Bien sûr, la transition énergétique nécessite d’énormes investissements pour le développement et l’utilisation effective de transports ‘verts’ et d’unité ‘vertes’ de productions industrielles. L’ordre de grandeur de ces investissements à l’échelle mondiale est à rapprocher du montant quotidien de 100 trillions d’euros constituant l’ensemble des transactions financières dans le « shadow banking » et à travers les plateformes financières qu’on appelle les « dark pools ». Cette course vers toujours plus de revenus financiers, se révèle être le syndrome pathologique d’une addiction à l’argent pour laquelle on devrait se pencher vers une réponse médicale…

Ces montants faramineux qui restent majoritairement inutilisés dans l’économie réelle, devraient être bloqués et redirigés par les gouvernements vers la transition énergétique(1). Ensuite, les Etats devront empêcher tout risque systémique bancaire en interdisant les opérations constituant des « paris » sur les prix des produits financiers, par une législation globale appropriée. Sa mise en place doit être mondiale et simultanée. Toute velléité du ‘système’ financier de se réinvestir dans une nouvelle bulle immobilière ne peut être contrecarrée que par une ‘saisie’ globale des avoirs.  

La réorientation de cette masse énorme d’argent en investissements dans les énergies renouvelables surabondantes(2), pour une transition énergétique dans le cadre de l’économie réelle contrôlée par les Etats, permettrait de rendre gratuitement les ménages énergétiquement autonomes et indépendants.